
L’historique du concept d’état limite se situe à la frontière des perspectives psychiatrique et psychanalytique. Le patient limite associe des modes de fonctionnement névrotique et psychotique qui varient selon le sujet.
Le terme de borderline désigne un trouble de l’identité présentant les caractéristiques suivantes : instabilité de la vie émotionnelle et affective, impulsivité, dysrégulation comportementale et perturbations cognitives.
Les premiers symptômes apparaissent généralement au début de l’adolescence et l’évolution clinique est lente. Cependant Bergeret (1974) puis Stone (1993) décrive une apparition plus tardive du trouble, aux alentour de la cinquantaine, provoquée par un événement de vie ayant réactivé un premier traumatisme.
La personnalité borderline est définit dans le DSM-V comme « un mode général d’instabilité des relations interpersonnelles, de l’image de soi et des affects avec une impulsivité marquée qui apparaît au début de l’âge adulte et qui est présent dans des contextes divers ».
PERSPECTIVE PSYCHANALYTIQUE
Dans une perspective psychanalytique, il s’agit d’une désorganisation intermédiaire entre psychose et névrose initialement isolée à partir de particularité de la relation thérapeutique observées par certains psychanalystes.
Selon Jean Bergeret le noyau central de la pathologie limite se situe autour de l’angoisse de perte de l’amour de l’objet, à l’origine d’une constante dépressive.
Pour Bergeret l’état limite est une maladie du narcissisme où la relation d’objet est centrée sur la dépendance anaclitique à l’autre et où le Moi se défend essentiellement contre la dépression.
https://psychopsycha.com/blog/la-personnalite/structure-de-la-personnalite/
Sa théorie permet de décrire les particularités du fonctionnement psychique des états-limites en rapport à la relation d’objet, aux défenses, à l’investissement libidinal et à la nature de l’angoisse. Bergeret « délimite l’organisation borderline entre la structure psychotique et névrotique, et intègre des sous-types dépressifs à l’intérieur de la diversité des états limites. (…) il fait le lien avec la personnalité narcissique, soulignant les blessures et conflits entre Moi et idéal du Moi. (…) La dépression et l’état limite ont une voie commune définitive, construite sur la perte d’objet prématurée, le rejet, la blessure narcissique. »

Winnicott fait l’hypothèse d’une perturbation du « holding maternel », l’enfant aurait eu à lutter contre une part malade de la mère ayant eu le désir inconscient de détruire son bébé, ce qui serait à l’origine du rempart défensif du « faux-self ».
Le déficit narcissique et le sentiment chronique de la peur de l’abandon sont liés à une dévalorisation de soi importante et à l’inflation de l’estime de soi.
https://psychopsycha.com/psychotherapie-de-lenfant/les-causes-de-la-peur-de-labandon/
Selon les psychanalystes cette dévalorisation expliquerait le besoin de source externe de comblement narcissique, d’où la nécessité de ne pas être abandonné. Winnicott parle « d’enfants qui n’ont pas acquis la capacité à jouer seul sous le regard de l’adulte » : l’objet transitionnel n’a pas pu être investi et l’individu garde une dépendance aux objets réels.
Les travaux de Widlöcher (1979) montre que la vie fantasmatique du sujet limite est faible, son aptitude à la rêverie et à l’imagination sont pauvres. De ce fait, le défaut d’investissement de l’espace psychique interne se traduit par une faible aptitude à un raisonnement intérieur et une faible capacité d’élaboration.
PERSPECTIVE COGNITIVO-COMPORTEMENTALE
D’un point de vu cognitif et neuro-développemental, le sujet état limite est essentiellement envisagé autour du modèle biosocial de Linehan.
Selon lui la personnalité borderline est due à une dysrégulation émotionnelle (sensibilité émotionnelle accrue et incapacité à réguler les réponses) et émerge dans l’interaction entre vulnérabilité biologique et facteurs environnementaux.
SYMPTÔMES
Le patient borderline est la plus fréquemment soumis à un état d’angoisse, aux perturbations cognitives, à un état de colère et d’irritabilité, ainsi qu’à un comportement impulsif.
- L’angoisse constitue une manifestation centrale du trouble, elle est constante et d’intensité variable
- Les perturbations cognitives se manifestent par :
– un trouble de l’identité : existence d’une instabilité marquée et persistante de l’image de soi.
– des épisodes dissociatifs : il s’agit le plus souvent d’épisodes de type paranoïaque non hallucinatoires comme des idées bizarres ou de suspicions injustifiées.
- Les colères sont inappropriées et mal maitrisées, ces accès de colère suivis de honte et de culpabilité, contribuent à la sensation « d’être mauvais ». De même, les accès de violence peuvent se retourner contre le sujet lui-même sous forme d’actes auto-agressifs, en ce sens le passage à l’acte suicidaire est à craindre.
Cette caractéristique est corrélée à des consommations de substance toxiques et actes auto-agressifs.
- De plus, une instabilité affective est souvent constatée, associée à une réactivité très marquée de l’humeur, inhérente à l’extrême sensibilité des sujets borderline aux facteurs interpersonnels impliquant un sentiment d’abandon de la part des proches.
- Enfin, l’impulsivité chez les patients limite peut se manifester par des conduites sexuelles à risque (Kernberg (1979) évoque la sexualité perverse polymorphe), des troubles alimentaire, la consommation de toxiques, conduites de jeu pathologique ou la dépendance excessive.

MÉCANISMES DE DÉFENSE
Concernant les mécanismes de défense à l’œuvre chez le borderline, on assiste à une rigidification des stratégies adaptatives contre l’envahissement du moi par l’angoisse.
Contrairement au patient névrosé, qui utilise pour lutter contre l’envahissement pulsionnel des défenses de l’ordre du refoulement, le patient limite ne dispose que de modalités défensives plus proche du fonctionnement psychotique organisées autour du clivage :
- Le clivage
- Le déni
- L’identification projective
- L’idéalisation primitive
- L’omnipotence et la dévalorisation

La diversité des travaux, ces dernières décennies, a contribué à mieux connaître la pathologie borderline, et nous a permis de constater un polymorphisme symptomatologique propre à cette pathologie.
Les personnes limites ont des difficultés à comprendre et interpréter leurs propres états internes ainsi que ceux des autres.
Leur rapport au monde est perçu avec hostilité et la relation à l’autre est teintée de méfiance et de crainte irrationnelle d’être abandonné, ce qui entraîne des relations interpersonnelles conflictuelle et instables.
Les perturbations des relations interpersonnelles sont au premier plan chez les patients borderline et constituent un enjeu majeur dans la compréhension et la prise en charge de ce trouble.