
Consommer des drogues pour intensifier les plaisirs charnels n’est pas un phénomène nouveau. Depuis toujours drogue et sexe vont de paire.
Cependant, l’esprit de notre époque est orienté vers « la course à la performance », les individus cherchent des substances qui stimulent, euphorisent et augmentent principalement la performance sexuelle.
De ce fait, se développe une pratique dangereuse, qui mélange sexe et drogues de synthèse, appelée le Chemsex.
QU’EST-CE QUE LE CHEMSEX ?
Chemsex est la contraction des termes « chemical » et « sex ». Le mot est apparu dans les années 2000 pour définir l’utilisation de drogues spécifiques, lors des relations sexuelles entre hommes.
Les pratiques de Chemsex ne sont cependant pas réductibles à la communauté gay. Au sein des couples hétérosexuels, le Chemsex est très fréquent, le plus souvent associé à l’usage de cocaïne. Il en va de même dans le milieu libertin.
Cette pratique consiste à consommer des substances psychoactives, principalement des stimulants, dans le but d’améliorer la performance physique en terme d’endurance, et de multiplier le plaisir sexuel.
Notons qu’il existe une pratique particulièrement risquée de Chemsex, le « Slam », caractérisé par l’administration de produits psychoactifs par injection intraveineuse. Pratique reportée comme minoritaire, elle est associée à une expérience intime intense au sein du couple, et touche au registre de la relation amoureuse plus qu’au sexe. Pratiqué dans le cadre collectif, le « Slam » renvoie à une forme de débauche. Cependant cette tendance est en voie de diffusion.
SOCIÉTÉ ADDICTOGÈNE
La pratique du Chemsex arrive dans une société où la sexualité libre, la performance et l’esthétisme sont magnifiés.
Dans un monde où les rencontres spontanées sont plus rares, où la recherche de bien-être prime, le sexe est devenu un objet de consommation comme un autre et n’échappe pas au diktat de l’hyperconsommation.
Internet rassure et facilite l’accès à tous les objets possibles d’addiction. L’omniprésence de la pornographie qui promeut une vision formatée du sexuel, l’émergence des réseaux sociaux qui favorise les nouvelles modalités de rencontres, ainsi que la possibilité de se fournir en drogue via le net, favorisent les comportements déviants. En un clic, drogues et sexe sont à portée de tous.
La prise de drogues entraine désinhibition, nouvelles sensations, plaisir sexuel, et endurance, de ce fait la jouissance mentale et sexuelle est plus forte, plus longue et sans entrave. Le lâcher prise est enfin possible, mais les plaisirs habituellement contrôlés, deviennent « no limite », au risque d’un sentiment de culpabilité.
Il existe un panel de drogues récréatives dont les effets varient d’une substance à l’autre. Stimulants, hallucinogènes, opiacés sont consommés, associés à des médicaments comme le viagra pour contrer les troubles sexuels inhérents la consommations d’autres substances.
Dans le cadre du Chemsex, au cours des dernières décennies, la consommation a évolué au profit des substances chimiques, le plus souvent, les drogues consommées sont le Christal Meth (Méthamphétamine), la Méphédrone, le GHB/GBL, la MDMA et la Kétamine.

LES DANGERS
Les dangers du Chemsex sont multiples. Le spectre s’étend des troubles physiques et psychiques aux problèmes socio-professionnels.
Lors de sessions sexuelles avec consommation de drogues et avec de multiples partenaires, les individus s’exposent au risque de contracter des maladies sexuellement transmissibles. L’effet désinhibant des substances pousse les consommateurs à adopter des comportements à risque (pas d’utilisation de préservatifs / échange de seringues).
Sous l’emprise des drogues, l’euphorie, le désir et les sensations sont intenses, les expériences sexuelles se multiplient. À cela s’ajoute des comportements plus « hard », les pratiques peuvent être violentes, et engendrer des agressions et des abus sexuelles, de même que des fissures et lésions traumatiques.
De plus, cette polyconsommation provoque des dommages physiques (nausées, vomissements, vertiges, troubles neurologiques), et peut engendrer des conséquences dramatiques. En effet, le Chemsex compte un nombre croissant de décès par overdose, d’accident ou d’arrêt cardiaque suite à un mauvais dosage des substances.
D’un point de vue psychique, la perte de maitrise de la consommation mène à l’addiction, entraine la désocialisation et la dégradation de la santé mentale. On observe un épuisement psychique majeur chez les usagers, avec des syndromes dépressifs ou des psychoses.
Certaines drogues ont un fort pouvoir addictogène, l’envie irrépressible de consommer entraine une perte de contrôle. Une double addiction peut s’instaurer : celle du sexe et celle du produit.

UNE PRATIQUE QUI SE BANALISE
L’utilisation de drogues dans les milieux festifs menant à des pratiques sexuelles est connue depuis les années 1970.
Le Chemsex émerge dans les années 2000, plus particulièrement avec l’avènement de nouvelles substances psychoactives. En parallèle, la nouvelle technologie a contribué et facilité l’accès au sexe et aux drogues.
Le développement des soirées privées à caractère sexuel et l’augmentation des usages de toxiques ont contribués à une augmentation des pratiques de Chemsex. De ce fait, une recrudescence des IST et du VIH est constatée.
DU PARADIS ARTIFICIEL AU GOUFFRE DE LA DÉPENDANCE
Le Chemsex ne concerne pas que le milieu gay, néanmoins, le phénomène est surtout présent dans la communauté homosexuelle. Le recours au Chemsex est un moyen de vivre une sexualité sans retenue pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes. L’homosexualité n’étant pas toujours bien acceptée, cette pratique devient une solution d’évasion.
Le Chemsex est à l’origine une pratique sexuelle accompagnée de drogues pour magnifier les plaisirs charnels. Cette pratique peut être expérimentale ou occasionnelle, mais peut amener ses adeptes sur la piste dangereuse de la dépendance et de la maladie.
Au delà des objets d’addiction comme les images, les drogues, le sexe ou internet, l’existence d’un mal-être, d’une souffrance chez le sujet dépendant est quasi présente. Comme pour toute addiction, on retrouve souvent des traumas dans l’enfance, des carences affectives, un rejet familiale ou social.
Si souffrance il y a, l’évasion durant des jours entiers dans des parties sexuelles, où le sentiment de fusion ressenti est intense, peut vite devenir addictif.
Les associations du domaine de la santé sexuelle accueillent et accompagnent les « chemsexeurs » à entamer un traitement vers la guérison. Au sein des organismes, des groupes de parole sont organisés dans le but de favoriser l’expression et le dialogue.
La prise en charge consiste à un accompagnement spécialisé en addictologie et en psychiatrie.